vendredi 7 juin 2019

Rencontre avec Vilhelm Hammershøi, le maître de la peinture danoise


C'était à Paris, lundi dernier, au Musée Jacquemart André : une magnifique découverte du maître de la peinture danoise, Vilhelm Hammershøi .

Autoportrait
1895

Cette exposition est la première rétrospective qui lui est consacrée en France depuis plus de vingt ans.




Elle réunit une quarantaine d'oeuvres majeures, grâce à des prêts exceptionnels.


Admiré et célébré de son vivant, Vilhelm Hammershøi (1864-1916) est progressivement tombé dans l'oubli après sa mort, excepté dans les pays nordiques.





Redécouvert dans les années 1990, il est parfois considéré comme le Vermeer du XX° siècle et reconnu comme un artiste de la lumière et du silence.


Ses peintures sont surprenantes, absolument magnifiques, et représentent, dans des gammes de gris et de blancs, de subtils intérieurs vides, énigmatiques, parfois habités par des personnages féminins perdus dans une profonde réflexion, souvent vus de dos, tournés vers des murs clairs et nus.





Ses intérieurs, ses portraits, baignent dans une atmosphère étrange, irréelle, dénuée de toute action, de toute anecdote.




La même atmosphère est présente dans l'oeuvre gigantesque où figurent cinq hommes (Cinq portraits 1901). Le tableau dégage une atmosphère de société secrète.


Ce portrait de groupe est considéré comme un des sommets de l'art danois.

Lors de la première moitié du XIX° siècle, les peintres de l'âge d'or danois ont particulièrement excellé dans l'art du paysage.

Hammershøi s'inscrit dans cette tradition mais en lui donnant un sens et une atmosphère bien différents : ses paysages deviennent des paysages intérieurs.




Bien qu'il ait choisi des paysages typiques du Seeland, comme tant d'autres artistes avant lui, il supprime tout détail pittoresque: ce sont de lointaines lignes d'horizon, scandées de quelques arbres, sans aucune présence humaine.




Quand il s'agit de paysages citadins, Hammershøi procède de la même radicalité : il dissous les détails dans une sorte de brume, de lumière voilée.



Les tonalités gris bleu accentuent la sensation d'humidité et de froid, et l'impression que nous sommes dans une ville fantôme, où le temps est comme suspendu.



Le nu constitue sans doute la facette la moins connue de son oeuvre : là aussi, la palette est restreinte, dominée par des tons de gris et les corps ne sont pas idéalisés.



Hammershøi construit ses tableaux lentement, par petites touches, ce qui lui permet de transcrire sur sa toile les infimes variations de la lumière: il en décrit toutes les vibrations.

"Ce qui me fait choisir un motif, c'est tout d'abord les lignes, ce que j'appellerais la tenue architectonique du tableau, et puis la lumière, évidemment."


On pourrait croire, à étudier l'impression d'immobilité qui émane de ses oeuvres, qu'il a peint inlassablement les mêmes intérieurs, alors qu'il a beaucoup voyagé, comme s'il n'avait voyagé que dans son propre univers intérieur, immobile, immuable...

Il a eu une  influence sur le grand cinéaste danois Carl Theodor Dreyer, qui aimait beaucoup ses oeuvres.
C. T. Dreyer
(1889-1968)

Dès l'automne 1904, Rainer Maria Rilke, qui vint le rencontrer à Copenhague, a écrit un essai sur l'artiste, qu'il considérait comme un maître.

R. M. Rilke
(1875-1926)

"Son oeuvre est lente et de longue durée, et quiconque l'étudie trouvera toujours l'occasion de dire ce qu'il y a d'important, d'essentiel dans l'art." Rainer Maria Rilke (Lettre à Alfred Bramsen , mécène et collectionneur d'Hammershøi)

La poésie magique du vide et de la lumière, qui émane de l'oeuvre d'Hammershøi nous surprend et nous touche encore aujourd'hui!

Courez au Musée Jacquemart André, avant le 22 juillet 2019!

A noter absolument : le beau livre de Philippe Delerm, "Intérieur, une rencontre avec le peintre Hammershøi", qui nous fait rentrer un peu plus dans l'intimité du maître.


1 commentaire:

  1. Curieusement je viens d'avoir la visite d'amis proches, enthousiasmés également par Hammershoi ; ils m'ont porté le journal de l'expo...
    Toute mon amitié
    JC
    Merci pour ton commentaire

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