jeudi 6 novembre 2025

Les Buttes-Chaumont : comment un sinistre dépotoir à ciel ouvert devint en 1867 l'un des plus grands et des plus beaux espaces verts de Paris

 

Jusqu'au milieu du XIX° siècle, l'emplacement n'avait rien d'idyllique!


C'était une zone de carrières de gypse et de pierres, exploitées depuis le Moyen-Âge, qui avaient laissé derrière elles des terrains instables percés de galeries et de cavités.

On appelait ce lieu le Mont Chauve, d'où "Chaumont". 


 Ces carrières, devenues dangereuses servirent ensuite de dépotoirs à ciel ouvert en particulier pour les boues, les fosses d'aisance et les ordures de la ville.

Vallonné et aride, le lieu servit de fosse à fumier et de station d’équarrissage pour les cadavres de chevaux. 


On y trouvait également des dépouilles d'animaux provenant des abattoirs proches de La Villette.

L'endroit était réputé pour ses émanations nauséabondes qui se répandaient sur la ville bien au delà du "Mont Chauve".

« Les Buttes-Chaumont devinrent le réceptacle de toutes les immondices de Paris ; on y voyait encore, il y a quelques années, des établissements d'équarrissage et le dépotoir des vidanges, ce qui répandait des émanations infectes, non seulement sur les quartiers voisins, mais sur la ville entière, selon la direction des vents. »

— Adolphe Alphand, Les Promenades de Paris 

La nuit, les carrières et leurs anfractuosités servaient d'abri à tous les miséreux, marginaux et malfaiteurs  de la capitale.

"Souper" dans les carrières des Buttes Chaumont
 

Dans des temps plus reculés, du Moyen-Âge jusqu'au 17° siècle, la justice royale était rendue au pied des buttes, là où se dressait le sinistre gibet de Montfaucon.

Le gibet de Montfaucon

Quand Napoléon III entreprend sa grande rénovation de Paris (1853-1870), confiée au Préfet Haussmann, il veut doter la capitale de grands parcs paysagers inspirés des jardins anglais, à la fois pour améliorer l'hygiène, offrir des espaces de loisirs populaires et embellir la ville.

 

Le baron Haussmann

Le Bois de Boulogne et le Bois de Vincennes sont créés à l'ouest et à l'est.

A l'intérieur de Paris naissent le Parc Montsouris au sud et le Parc des Buttes-Chaumont au nord-est. 

Avec près de 25 ha, le Parc des Buttes-Chaumont est l'un des plus grands espaces verts de Paris. Voir ici.

Plan du Parc des Buttes-Chaumont
 

Napoléon III charge l'ingénieur Adolphe Alphand de mener à bien la conception et la réalisation du Parc. Voir ici.

Adolphe Alphand

 Le chantier commence en 1864 , dure jusqu'en 1867 et nécessite des moyens colossaux.

Le chantier est titanesque, mobilise 1000 ouvriers, 100 chevaux et deux machines à vapeur. 

Les carrières instables sont comblées ou consolidées.

Le Parc actuel



Les reliefs naturels sont réaménagés pour créer un paysage pittoresque avec vallons, collines et points de vue. 

 Un lac artificiel est creusé au fond d'une ancienne carrière.

 On construit une île rocheuse dominée par le Temple de la Sibylle.

Le Temple de la Sibylle
 

On perce des grottes et cascades artificielles dans les anciennes carrières de gypse.


Des ponts dont une passerelle suspendue signée Gustave Eiffel relient les différentes parties du Parc.

 


Le tout est végétalisé avec des milliers d'arbres et de plantes soigneusement choisis pour leur effet romantique et dépaysant.


 

Le Parc est inauguré le 1° avril 1867 lors de l'Exposition Universelle de Paris.

Le Parc et ses arbres en 1871
 

Le Parc des Buttes-Chaumont, âgé de 158 ans, reste aujourd'hui encore l'un des plus beaux exemples de la nature "artificiellement sauvage" du Second Empire, un mélange de romantisme et de prouesse technique : un parc magnifique, vrai poumon de Paris,  où les parisiens prennent un grand plaisir à venir se promener et se reposer.

 

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