jeudi 19 décembre 2013

Opéra : un Parsifal éblouissant à Covent Garden


Mercredi soir, de 17h45 à...23h45 (avec 2 entractes), nous avons assisté à une retransmission en live depuis le Royal Opera House de Londres (Covent Garden) à un Parsifal de Wagner éblouissant et bouleversant de douleur, de souffrance, de malédiction, d'amour, de compassion, de foi, de transformation intérieure et de rédemption.
Voir l'argument de Parsifal ici.


Cet opéra de Wagner (son oeuvre ultime) est en fait un "Bühnenweihfestspiel", un drame sacré créé le 26 juillet 1882 lors du 2° Festival de Bayreuth.

Il est fondé sur l'épopée médiévale Parzival de Wolfram Von Eschenbach (1170-1220, voir ici) et sur Perceval ou le Conte du Graal de Chrétien de Troyes (1135-1181, voir ici).

Cette oeuvre, fortement marquée par l'évolution spirituelle de Wagner, fut composée sous l'influence platonicienne de Schopenhauer. Wagner en écrivit lui-même le livret.

Les références spirituelles (chrétiennes et bouddhistes) se mêlent à des rêves métaphysiques et des combats ésotériques.

Le thème essentiel de l'oeuvre est le choix du renoncement et de la compassion comme chemin vers la rédemption.


Simon O'Neill et Angela Denoke

Pendant les vingt premières années, toutes les représentations de Parsifal ont eu lieu au Festspielhaus de Bayreuth, Wagner ne souhaitant pas que son oeuvre devienne un simple divertissement pour public d'opéra.

Le monopole de Bayreuth sur Parsifal a pris fin en janvier 1914.
Les attentes autour de Parsifal étaient telles que l'opéra a été donné dans plus de 50 salles européennes en le 1° janvier et le 1° août 1914...

Nous nous sommes laissés emporter par la musique puissante et majestueuse magnifiquement jouée par l'orchestre du Royal Opera House, sous la baguette inspirée d'Antonio Pappano.

Antonio Pappano, Directeur artistique
du Royal Opera House

A signaler une mise en scène magique de  Stephen Langridge (Voir ici ses productions) et des décors originaux de Alison Chitty, modernes, mais sobres, au service de cette oeuvre tragique et profonde.

Un moment magique et audacieux fut celui du dévoilement du Graal, représenté par un jeune garçon en agneau immolé...

Pasifal : une oeuvre poétique, fascinante, profondément émouvante, magistralement servie par des interprêtes de très haut niveau :

Simon O'Neill dans le rôle de Parsifal :


Angela Denoke, magnifique, dans le rôle de Kundry :




René Pape, toujours exceptionnel de présence, dans le rôle de Gurnemanz :

René Pape (à droite) et Simon O'Neill
Gerald Finley, bouleversant, de par son expression de la souffrance indicible d'Amfortas :




Et Willard White, incarnant de façon extraordinaire la puissance maléfique du magicien Klingsor :

Willard White et Angela Denoke

En résumé, un opéra qui fut plus, pour nous, qu'un simple spectacle : c'est comme s'il nous avait été donné de participer directement à cette épopée spirituelle.


Ecoutez le magnifique prélude à l'Acte I ici.

Et ici, Antonio Pappano nous introduit à la musique de Parsifal avec Gerald Finley (Amfortas) et Simon O'Neill (Parsifal).


vendredi 13 décembre 2013

Randonnée : A partir de Saorge, dans la Vallée de la Roya



Il y a trois jours, nous randonnions au départ de Saorge, magnifique village situé dans la Vallée de la Roya, dans les Alpes Maritimes. Voir ici.


Saorge
Saorge
Ruelle à Saorge

Par une après midi quasi printanière, nous avons arpenté, en 3h, le "Circuit de Peiremont", soit 360m de dénivelé : de 510m à Saorge à 870m à l'abreuvoir de la Pinée.
C'est une randonnée facile, sauvage et magnifique, et qui plus est fut ensoleillée du début à la fin.

Sentier du circuit de  Peiremont

Il est possible d'effectuer depuis la Pinée l'ascension du Col de Peiremont : 1040m par un sentier raide en 1h AR.

Vers le Col de Peiremont : encore 170m!

"Cette randonnée se situe dans l'adret ensoleillé qui domine Saorge, magnifique village médiéval jadis organisé verticalement de façon audacieuse pour répondre aux contraintes d'un territoire exigu.
Les maisons aux étages empilés s'adossent à la pente alors qu'à leurs pieds, des venelles secrètes s'infiltrent sous les voûtes et sautillent d'escaliers en porches..."
Voir ici le descriptif complet de ce beau petit circuit donné par le Conseil Général des Alpes Maritimes.

Les monuments sont remarquables, tant à Saorge que sur le circuit où nous pouvons admirer la massive et originale chapelle Ste Croix.

Chapelle Ste Croix

Chapelle Ste Croix

Nous observons également des casouns malheureusement plus ou moins en ruine.

Casoun en ruines à la Pinée

Ce type de bergeries ou abris à voûtes en doucine est omniprésent dans la région de Saorge, de Breil sur Roya, dans la Vallée du Cayros.

Casoun
Casoun sur la commune de Saorge

Ces constructions économiques et solides s'expliquent par l'abondance des pierres, l'absence d'argile pour faire des briques, la difficulté de transport des lauzes (pierres plates servant de couverture des bâtiments, comme à Tende), et l'usage très réglementé de l'utilisation du bois.

Le retour sur Saorge, toujours ensoleillé, est un enchantement, et nous permet une visite des ruelles pittoresques du village, désert en cette saison.

Retour vers Saorge et le
Monastère des Franciscains
A noter, à propos du Monastère des Franciscains : le couvent des "Franciscains Observantins Réformés", ou "Récollets", a été fondé en 1633.
En 1794, ils en furent chassés par les soldats français qui l'occupèrent.
Rendu aux Franciscains en 1824, ils y demeurèrent jusqu'en 1903, puis y revinrent de 1969 à 1988.

Classé Monument historique, l'Etat en est désormais propriétaire.
Le Ministère de la Culture a décidé d'y organiser des "retraites d'écriture" (Voir ici).
De nombreuses manifestations culturelles y sont également organisées.


lundi 2 décembre 2013

Mali : disparition de l'écrivain et éditeur Moussa Konaté


J'ai été très touché d'apprendre ce matin la disparition à 62 ans de l'écrivain malien Moussa Konaté.
Il vivait à Limoges depuis 1999.

Moussa Konaté

Moussa Konaté était une grande figure du paysage intellectuel malien : écrivain, éditeur, directeur malien du Festival Etonnants Voyageurs qui s'est tenu à partir de 2001 et pendant 10 ans à Bamako.

J'ai appris à le connaître au travers de ses romans policiers surprenants et réjouissants, et des aventures savoureuses de son (anti)héros, le commissaire Habib.

Le commissaire Habib mène ses enquêtes avec toute la bonne volonté et la rationalité d'un enquêteur venu de Bamako, formé à l'école des blancs.

Mais sa logique est mise en déroute face aux mystères et traditions des régions qu'il découvre, lui le citadin de Bamako, et dans lesquelles il nous entraine à sa suite.

En effet le fossé est aussi profond entre les habitants de Bamako et ceux du Niger ou du Pays Dogon qu'entre les habitants de la France profonde et ceux de Bamako.

L'incompréhension règne à tous les coins de rue, et la découverte de l'Autre, dans sa spécificité si particulière, devient une aventure intérieure pour le commissaire Habib, et pour nous à sa suite.

Amoureux du Mali, j'ai retrouvé avec plaisir les Bozos dans "La Malédiction du Lamantin" :


J'ai savouré l'enquête menée au Pays Dogon (où je me suis rendu trois fois et où j'espère bien retourner dès que possible) dans "L'Empreinte du Renard":


"Je ne vois pas de différence entre le roman policier et le roman en général. 
Le roman policier a toute sa place dans la littérature".

Moussa Konaté s'était découvert tout enfant une passion pour le livre via la lecture de Tintin, et entra très vite en littérature.
Devenu professeur, il fonda à Bamako une compagnie de théâtre puis les éditions du Figuier, publiant des livres pour la jeunesse.

Il s'était illustré comme une voix importante du combat contre la dictature de Moussa Traoré par des livres comme "Mali, ils ont assassiné l'espoir".



Il a également publié un essai, que j'ai lu avec attention et émotion : "L'Afrique Noire est-elle Maudite?" où il interroge les maux  de son continent, en signalant en particulier le poids de la famille, mais en rendant cependant hommage aux richesses et aux potentialités de la société malienne.


Voir ici une interview de Moussa Konaté, en 2010, à l'occasion de la sortie de cet essai.

Il y avait chez Moussa Konaté une intelligence d'une grande finesse, une lucidité extrême, une bonté un peu triste, et une grande ouverture aux autres.

Moussa Konaté

Il suffit de regarder son sourire éclairer son visage de l'intérieur, et tout est dit de sa personnalité!

dimanche 1 décembre 2013

Jazz Blues : James "Blood" Ulmer & David Murray Octet à Mulhouse


Nous avons assisté à un formidable concert de Jazz/Blues  hier soir samedi 30 Novembre à La Filature à Mulhouse.

Il s'agissait de la formation "James Blood Ulmer & David Murray Octet".

James Blood Ulmer, né en 1942 en Caroline du Sud est guitariste, chanteur de jazz et de blues.

Dans les années 80 il fut considéré comme l'un des guitaristes les plus innovants, donnant à sa guitare  une sonorité singulière aux confins du blues, du funk et du jazz.

En 1971 il a joué avec les Jazz Messengers d'Art Blakey...ce qui ne me rajeunit pas, soit dit en passant, les ayant écouté en live dans une cave à New York en 1963...

Il a rejoint Ornette Coleman, qui l'a beaucoup influencé,  dans les années 70.

James "Blood" Ulmer

Ecoutez le ici à Genève en 2010.
Sa voix chaude et envoûtante nous entraine vers un blues qui swingue langoureusement.


David Murray, né à Oakland en 1955 est un saxophoniste de jazz extraordinairement doué.

David Murray

J'avais déjà eu l'occasion de l'écouter, avec enthousiasme, en octobre 2010 sur la même scène de La Filature à Mulhouse, qui décidément, et pour notre plus grand bonheur, récidive dans une fantastique programmation!
J'avais écrit une note à l'époque sur ce spectacle : ici .

Ecoutez le à New York en 1986 ici .

David Murray a reçu le Jazzpar Prize, le "Nobel" du jazz pour sa démarche qui intègre les espaces de liberté ouverts par le free jazz, la référence aux racines africaines et le rejet des normes.

Ces deux magnifiques musiciens sont des partenaires privilégiés, des frères d'armes depuis plus de 40 ans, de véritables complices, en particulier dans l'improvisation!


Ce concert était donné en hommage au musicien Lawrence D. "Butch" Morris, décédé en janvier 2013.

Lawrence D. "Butch" Morris

Morris fut compagnon musical de longue date de David Murray, et inventeur d'une nouvelle méthode d'improvisation surnommée "Conduction", qui a fait de lui l'un des conducteurs de big band les plus révolutionnaires de l'ère "post-swing".

Cette soirée fut un magnifique moment de blues avec des artistes et un groupe talentueux, qui ont su communiquer leur enthousiasme à une salle comble...et comblée.

Voir ici James Blood Ulmer & David Murray Big Band, enregistrés en 2011 et 2012.