samedi 22 avril 2023

22 Avril 1889 : le jour où les Amérindiens de l'Oklahoma sont spoliés de 800 000 ha

 

Le 22 Avril 1889, il y a exactement 134 ans, des dizaines de milliers de colons européens se sont partagé les territoires indiens de l'Oklahoma, en prenant part au "Land Run", ou "Land Rush", une furieuse cavalcade dans le but de faire main basse sur les territoires amérindiens brusquement offerts à la colonisation.

Summary : On April 22, 1989, exactly 134 years ago, tens of thousands of European settlers shared the Indian Territories of Oklahoma, taking part in the "Land Run" or "Land Rush", a furious cavalcade in the purpose of taking control of the Amerindian Territories suddenly offered for colonization.



Ruée vers l'Oklahoma

Ce jour là, les autorités américaines ouvrent à la colonisation une étendue de 8000 km2, l'équivalent de la Corse ou de l'Alsace, sur la base d'un principe à la fois simple et stupéfiant : "Premier arrivé, premier servi"! Voir ici (en anglais).

A midi pile, ce jour là, le lieutenant Samuel E. Adair, du 5° Régiment de cavalerie fait sonner le clairon.

C'est aussitôt le départ d'une ruée sauvage et impitoyable, d'une mêlée indescriptible : les colons s'abattent alors comme un vol de sauterelles dans toute la plaine verte pour foncer vers les parcelles convoitées.

Voir ici.


De longues files de chariots bâchés, et des cavaliers s'élancent, prêts à prendre le plus vite possible possession de leurs futures terres, et à en découdre pour arriver à leurs fins!

La ruée du "Land Run"

Sauf que celles-ci sont sur le territoire attribué aux Amérindiens de l'Oklahoma "pour l'éternité" : cet "Indian Territory" de l'Oklahoma, partagé entre les Choctaw, Chicasaw, Creek, Seminole, Osage, était alors le dernier refuge des Amérindiens après des décennies de violences et de déplacements de populations.

Les territoires indiens de l'Oklahoma

Ce "Land Run" du 22 Avril 1889 reste l'un des épisodes les plus hallucinants - les plus brutaux - de la conquête de l'Ouest ...


Cette méthode pour le moins curieuse fut choisie par le Congrès américain, car il y avait trop de candidats et trop peu de surfaces et aucun mode de sélection possible entre les colons.

Il suffisait donc d'arriver le premier sur le terrain et d'en prendre possession en y plantant un poteau portant l'inscription : "This land is mine" (Cette terre est mienne).

Les Amérindiens de l'Oklahoma sur leurs terres

Mais de nombreux tricheurs et resquilleurs n'avaient pas attendu le son du clairon et étaient déjà sur place, s'étant élancés avant les autres à bride abattue dans la Réserve : on imagine facilement que les conflits aient pu se terminer en bains de sang.


C'est ce qu'on a appelé pudiquement le "darwinisme social": la survie des mieux adaptés dans un contexte de gouvernement minimal.

Voir cet ouvrage "Terres Promises" sur la spoliation des Terres Indiennes aux Etats-Unis au XIX° siècle, consultable en ligne ici.



mercredi 19 avril 2023

La Pologne marque le 80° Anniversaire du soulèvement du Ghetto de Varsovie, le 19 Avril 1943

 

Il y a exactement 80 ans,  le 19 Avril 1943, dans le ghetto de Varsovie, une poignée de combattants juifs attaquèrent les nazis pour mourir l'arme à la main plutôt que dans un camp d'extermination. Lors des commémorations organisées mercredi dans la capitale polonaise, le président allemand Frank-Walter Steinmeier a demandé pardon pour les crimes de ses compatriotes.

Le Président Allemand Frank Walter Steinmeier (G),
le Président Polonais Andrzej Douda (C) et
le Président israélien Isaac Herzog (D)
à Varsovie, le 19 Avril 2023

Commémoration à Varsovie

Le soulèvement du ghetto de Varsovie

Pour la chronologie, voir ici.

Pour se souvenir : écouter ici sur France Culture!

Opéra : à l'Opernhaus de Zürich, un Rigoletto original et magnifique

 

Nous avons pu visionner sur Mezzo une version de Rigoletto de Verdi dans une mise en scène minimaliste, hors du temps et de l'espace, donnant toute leur place aux voix, splendides, des interprètes.

Rigoletto est l'un de mes opéras préférés de Verdi et je ne me lasse pas de voir différentes interprétations : une, totalement anachronique, au Met, qui se déroule dans un Casino de Las Vegas (ici), une autre, somptueuse, au Liceu de Barcelone (ici),...

On pourra encore visionner cette retransmission sur Mezzo le 4 Mai 2023 à 18h20.

Saimir Pirgu (Le Duc de Mantoue)
et Aleksandra Kursak (Gilda)

La Philharmonique de Zürich et les Choeurs de l'Opéra de Zürich, sous la direction de Fabio Luisi, nous ont offert une interprétation formidable de cette oeuvre dramatique.

Fabio Luisi

La mise en scène, signée de Tatjana Gürbaca, gomme toute référence au temps et à l'espace, et est totalement épurée : pas de palais du Duc de Mantoue, pas de maison de Rigoletto, pas de taverne près de la rivière, mais une longue table entourée de chaises, sur un arrière plan noir.



Tatjana Gürbaca

Ce choix de mise en scène rend l'intrigue difficile à suivre pour qui ne la connait pas bien, mais elle crée une distance, un détachement par rapport au déroulé des évènements, et a l'avantage de donner toute leur place aux interprètes.

Aleksandra Kursak, soprano,  est une magnifique Gilda.

Aleksandra Kursak

Le baryton George Petean s'est dramatiquement et musicalement totalement investi dans le rôle titre.

George Petean

Saimir Pirgu, ténor, nous offre, avec sa voix exceptionnelle, un Duc de Mantoue séducteur, frivole, et terriblement manipulateur, au milieu de sa cour de courtisans prêts à tout pour rabaisser et humilier les autres.

Saimir Pirgu

Je me souviens d'une interprétation magnifique par Saimir Pirgu du rôle de Rodolfo dans "La Bohème" de Puccini en 2016 au Liceu de Barcelone.

En résumé, j'ai vraiment apprécié cette version de Rigoletto!

Voir ici le trailer de cette représentation.



lundi 17 avril 2023

Hommage au jazzman Ahmad Jamal

 

Ahmad Jamal (Frederick Russel Jones) est mort hier à l'âge de 92 ans, dans le Massachusetts.

Ahmad Jamal
1930-2023

Le légendaire pianiste américain, qui inspira Miles Davis et Keith Jarrett, était un jazzman charismatique qui s'était affirmé dès les années 1950. Voir ici.

Nous avions eu le très grand plaisir de l'écouter en live à La Filature, à Mulhouse, le 27 avril 2010 : un moment magique. Voir ma note ici.

Ecouter ici "Autumn Leaves" au Palais des Congrès à Paris, 2017.


dimanche 9 avril 2023

Tracy Chapman, musicienne américaine engagée, au style blues, folk et soul


Tracy Chapman est une auteure-compositrice interprète née le 30 mars 1964 à Cleveland, dans l'Ohio: ici.

Tracy Chapman

Son parcours est exceptionnel : d'une enfance défavorisée à un succès planétaire.

Tracy Chapman

Son style mêle blues, folk et soul et son répertoire a une dimension contestataire et engagée.

Et c'est le 11 juin 1988, lors d'un concert de soutien à Nelson Mandela , emprisonné en Afrique du Sud, qu'elle présente publiquement son album pour la première fois. Et ce jour là elle chante pieds nus contre la pauvreté et le racisme et pour l'amélioration de la condition féminine et fait un triomphe.

Elle se produit également en soutien à Amnesty International.

Ses singles "Talkin'bout A Revolution" et "Baby Can I Hold You", sont des succès immédiats et Tracy Chapman s'impose alors sur la scène internationale.


Simplement accompagnée de sa guitare, elle a su défendre ses opinions au fil de sa longue carrière.

En 1995, Tracy Chapman sort son quatrième opus intitulé "New Beginning" aux sonorités beaucoup plus blues.

Son single "Give Me One Reason" devient la chanson de l'année 1996 aux Grammy Awards et son album se vend à plus de 8 millions d'exemplaires.

En 1999 elle participe au concert One Love Tribute en hommage à Bob Marley.


En 2012, elle participe au concert Tribute to Buddy Guy au Kennedy Center devant le Président Barack Obama : elle y interprète la chanson blues "Hound Dog".


"Let It Rain" et "Where You Live" sont tous les deux vendus à plus de 2 millions d'exemplaires en France et c'est la consécration de la chanteuse américaine et son succès ne se dément pas jusqu'en 2013.

Elle a réalisé 8 albums studio et 2 compilations vendus à plus de 40 millions d'exemplaires à travers le monde.


Au delà de son statut de chanteuse, Tracy Chapman demeure une guitariste engagée qui incarne depuis le début de sa carrière un combat exemplaire pour les droits de l'homme.

Certains de ses titres dénoncent les murs invisibles érigés entre les populations noires et blanches aux Etats-Unis, d'autres critiquent les lois relatives au port d'armes et fustigent la brutalité policière à l'encontre des minorités. 

Elle décrit également les violences faites aux femmes en des termes poignants.

Ecoutez ici "Baby Can I Hold You".

Ici : "New Beginning".

Ici : "Give Me One Reason" avec Eric Clapton.

Ici : "Hound Dog".

Ici : "Let It Rain".




mercredi 5 avril 2023

A Colmar, à l'Espace Malraux : Francis Hungler, graveur étonnant, entre figuration et abstrait

 

Une exposition consacrée à Francis Hungler se tient actuellement à l'Espace Malraux, à Colmar (du 25 mars au 21 mai 2023). Elle est intitulée 360°.


Francis Hungler est graveur-plasticien. Voir son site ici.

Pour lui, la gravure est un art de résistance. Résistance de par les matières et la technique, mais aussi parce qu'en gravure on peut recycler ou travailler l'oeuvre à l'infini.

Les traces laissées par Francis Hungler se jouent de la représentation figurative, explorant les infinis possibles de l'art abstrait. 

Francis Hungler a choisi de présenter au rez-de-chaussée de l'Espace Malraux une série de paysages, mornes plaines aux ciels gris de plomb.





Les plaques de ce métal gris-bleu, il les récupère auprès de couvreurs-zingueurs et elles portent encore des traces de leur utilisation première : plis, déchirures, marques d'oxydation,...





La matière-plomb est d'une richesse plastique étonnante et donne à ces ciels orageux une pesanteur mais aussi une vivacité incomparables.


Au dessous de ses ciels de plomb, Francis Hungler présente des horizons familiers : villes, villages et vergers, balayés par le vent qui précède une giboulée de printemps ou un orage d'été.




A l'étage, c'est une autre histoire, avec sa série de cartes géographiques gravées sur feuilles de plomb.



Les supports usés par le temps se muent en parchemins millénaires et ésotériques.

Mais tout n'est pas si sombre, car les oeuvres de Francis Hungler présentent également l'espoir d'un renouveau : la figure omniprésente de l'arbre.




Nomade, promeneur, voyageur, l'artiste glane ça et là des images mentales de paysages montagneux, d'une nature sauvage et immuable, sans cesse renouvelée.


"Mon travail trouve son inspiration dans des cartographies aléatoires. Les soubresauts de mes outils dans la matière de mes supports laissent des tracés insoumis. Apparaissent de fragiles frontières entre l'ombre et la lumière où il n'est pas rare d'observer une rencontre entre le point et la ligne. La surface n'est autre qu'un lieu de passage où l'encre tente de retenir des constellations éphémères."


Ses oeuvres sont conservées dans les cabinets des Estampes de Mulhouse, Colmar, Strasbourg et Vevey.




lundi 3 avril 2023

Le Racisme en images : Déconstruire ensemble

 

Ce livre passionnant et instructif publié  en 2021 par les Editions de la Martinière est une saisissante histoire visuelle et mondiale du racisme.


Il a pour objectif de nous aider à maîtriser tous les codes et toutes les représentations du racisme.

Voila une manière nouvelle et originale d'aborder l'histoire par l'image et de décrypter le discours raciste à travers plus de 230 documents réunis et commentés par l'historien Pascal Blanchard (ici) et l'anthropologiste Gilles Boëtsch (ici).

Pascal Blanchard

Gilles Boëtsch

Parler de racisme, c'est parler d'une histoire-monde, celle de la xénophobie, de l'antisémitisme, des préjugés, de l'esclavage ou celle de la ségrégation.


Mais c'est aussi parler d'images : la caricature, les objets, l'affiche politique ou de propagande, la publicité ou le tract, la photographie ou la peinture.


Nombreux sont les supports qui ont véhiculé la représentation de l'"autre" comme un être inférieur, stigmatisé dans sa différence, que celle-ci soit ethnique, religieuse, culturelle ou sexuelle.


En analysant près de 250 images, Pascal Blanchard et Gilles Boëtsch décryptent les différentes strates de cette haine de l'autre, dans une perspective historique, culturelle et thématique.


Les auteurs donnent aussi la parole à une quinzaine de personnalités et chacun livre un éclairage à hauteur de sa propre expérience, de ses convictions et de ses engagements.


Dans ce livre passionnant et éclairant, ils s'attachent à "déconstruire" les images du racisme.


"Déconstruire, ce n'est pas détruire mais démonter les présupposés sur lesquels s'appuient ces images pour leur donner une nouvelle signification et rendre audibles leurs effets nocifs".


Cette culture visuelle a contribué pendant des siècles à façonner des relations tronquées, marquées par une violence pouvant aller jusqu'à l'extermination ou au génocide.