mardi 21 septembre 2010

Viens voir les bohémiens, voir les musiciens...

"Je me suis pâmé, il y a huit jours, devant un campement de Bohémiens qui s'étaient établis à Rouen.

Voilà la troisième fois que j'en vois.
Et toujours avec un nouveau plaisir.

L'admirable c'est qu'ils excitaient la haine du bourgeois, bien qu'inoffensifs comme des moutons.

Je me suis fait très mal voir de la foule en leur donnant quelques sols - Et j'ai entendu de jolis mots à la Prud'homme.

Cette haine là tient à quelque chose de très profond et de très complexe.

On la retrouve chez tous les gens d'ordre.

C'est la haine que l'on porte au Bédouin, à l'hérétique, au philosophe, au solitaire, au poète.

Et il y a de la peur dans cette haine.

Moi qui suis toujours pour les minorités, elle m'exaspère.
Il est vrai que beaucoup de choses m'exaspèrent.

Du jour où je ne serai plus indigné, je tomberai à plat, comme une poupée à qui on retire son bâton."

Correspondance de Gustave Flaubert,
Lettre à George Sand. 12 Juin 1867.
Ed de la Pleiade - Tome V - p. 653

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