lundi 14 novembre 2011

Film turc : il était une fois en Anatolie, un certain regard...


Le réalisateur turc Nuri Bilge Ceylan nous entraine, dans "Il était une fois en Anatolie", dans un road movie nocturne absolument étonnant et magnifique.

Je m'y suis laissé prendre totalement, malgré la lenteur et la longueur du film (2h30).

C'est qu'il s'agit non seulement, dans cette longue traversée nocturne de la steppe anatolienne, d'aller, à la lueur des phares, à la recherche d'un improbable cadavre, mais surtout de tenter de sonder au plus profond les âmes des protagonistes de cette étrange quête.

" Si vous voulez trouver quelque chose, il faut d'abord vous perdre! "

Nuri Bilge Ceylan brouille les pistes : un meurtrier guide un procureur, un médecin et des policiers à la recherche du corps de sa victime, de fausse piste en fausse piste.

Chacun d'entre eux, et à tour de rôle, "dirige" et entraine les autres à sa suite, dans sa propre errance.

Le spectateur finit par éprouver une sorte de tendresse pour ce meurtrier qui est pris de sanglots à l'apparition de la lumineuse jeune fille dans la nuit, lors d'une halte.

Les paysages désertiques du plateau anatolien, filmés de nuit, à la lueur des phares, tels des yeux qui sondent les ténèbres, nous donnent de magnifiques images dont chacune est un tableau qui m'a totalement transporté.

Lors de la séquence qui se déroule chez le maire d'un petit village où les protagonistes font halte, le réalisateur nous offre des images en clair obscur fantastiques, à la George de la Tour, où le visage de madone d'une jeune fille illumine et bouleverse la profonde nuit extérieure, mais aussi celle des âmes et des esprits.

Dans un second temps, le jour enfin levé, le réalisateur nous entraine dans la profondeur des drames intérieurs des personnages.

Personne n'échappe à son propre destin et aux drames de sa vie : pas plus le procureur, qui prend conscience d'avoir causé la mort de sa femme, que le médecin, divorcé, que le commissaire, torturé par le handicap de son enfant.

Nous sommes tous embarqués dans la même galère, sur une mer incertaine , pleine de risques et de mystères...

Les regards, dans ce chef d'oeuvre, sont omniprésents : interrogateurs, accusateurs, agressifs, ou bien intérieurs et pacifiés, des regards qui tels ceux du médecin, s'adressent par moment directement au spectateur : et vous, où en êtes vous?...


La découverte du cadavre, puis son autopsie ne nous livreront pas clairement la clef du mystère.
Il vaut mieux ne rien révéler de ce qui a pu causer la mort.

La raison profonde des actes des uns et des autres nous demeurera à jamais cachée.
Rien ne sert, finalement, de vouloir procéder à l'autopsie des âmes...

Voir :
http://www.youtube.com/watch?v=kYk2kJljBjA

1 commentaire:

JCMEMO a dit…

Bravo pour ton article..
Je partage ton : tout comme toi, je me suis laissé prendre, une sorte d'envoutement.
Trés cordialment.